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Recommandations WSAVA 2024 en matière de stérilisation : synthèse pratique (d'après le résumé original)

30/08/2024
Le Comité de contrôle de la reproduction de la WSAVA a élaboré des recommandations concernant la stérilisation des chiens et chats au regard des dernières avancées scientifiques. Le texte original a été publié en mai 2024 et est en libre accès sur le site de la WSAVA (lien en bas de page).

Ci-dessous vous est proposée une synthèse pratique directement rédigée d'après le résumé officiel des recommandations et approuvée par le Comité de contrôle de la reproduction (RCC).

 

Stérilisation chirurgicale avec suppression des hormones stéroïdiennes gonadiques (ie gonadectomie) : quand la pratiquer et quelle balance bénéfices-risques ?

De manière générale, la gonadectomie permet de prévenir, de manière définitive, la reproduction et la plupart des maladies des organes reproducteurs. A contrario, une augmentation de l’incidence de certains types de cancers, affections orthopédiques, dysendocrinies ou troubles comportementaux est décrite chez certains profils d’animaux gonadectomisés. Dès lors qu’une gonadectomie est envisagée, une étude approfondie de chaque cas doit ainsi être systématiquement engagée : il s’agit de prendre en compte le mode de vie de l’animal, sa race, son âge, son état corporel, d’estimer les risques et bénéfices de l’intervention et de considérer les besoins et attentes du propriétaire. Ces éléments doivent être discutés avec ce dernier et mener à une décision éclairée.

Ces recommandations doivent intégrer les impératifs locaux liés à la gestion éthique des populations animales.

 

En pratique : 

  • Chien mâle

En dehors de certaines situations précises (tumeur testiculaire ou cryptorchidie par exemple) pour lesquelles la gonadectomie est systématiquement recommandée, la stérilisation chirurgicale ne doit pas être systématisée. Elle peut néanmoins être envisagée lorsqu’un contrôle strict et définitif de la reproduction est souhaité ou pour prévenir l’apparition ou la récurrence de certaines affections androgéno-dépendantes (hyperplasie bénigne de la prostate, prostatite, adénomes des glandes péri-anales…), notamment lorsqu’un suivi régulier de l’animal et de sa santé ne peut être garanti.

À noter : lorsque la castration est envisagée pour gérer des comportements indésirables, il faut garder à l’esprit que ces derniers ne sont pas tous liés à la testostérone. Les experts de la WSAVA recommandent ainsi l’usage des agonistes de la GnRH en test avant de procéder à une gonadectomie.

  • Chienne

Comme chez le mâle, la chienne peut être maintenue entière si elle bénéficie d’un suivi médical régulier permettant de dépister et de gérer précocement des affections mammaires, utérines ou ovariennes. Si une gonadectomie est justifiée, celle-ci devrait idéalement être réalisée après le 1er ou 2e oestrus afin de s’assurer du bon développement de l’appareil uro-génital.

À noter : la prévention des tumeurs mammaires et du pyomètre ne devrait pas être la seule raison de procéder à une gonadectomie chez la chienne, surtout pas avant la puberté. La gonadectomie prépubertaire peut entraîner des problèmes de santé tels qu’une dermatite périvulvaire et des infections récurrentes de l’appareil urogénital, ainsi que des problèmes orthopédiques et des tumeurs.

  • Chat mâle et femelle

La prolificité et la puberté précoce dans l’espèce féline, ainsi que les difficultés qu’implique la cohabitation avec l’homme, orientent souvent vers la suppression à long terme des hormones sexuelles chez le chat. La gonadectomie, irréversible, apparaît souvent comme la méthode de choix : pratiquée en période péripubertaire, elle permet de prévenir toute reproduction non désirée, l’apparition des comportements sexuels, mais aussi de diminuer le risque de tumeurs mammaires, particulièrement agressives chez la chatte.

À noter : la gonadectomie prépubertaire pourrait provoquer des fractures épiphysaires chez les chats mâles et femelles, du fait de la fermeture retardée de l’épiphyse. Des publications récentes montrent une incidence plus élevée de certaines tumeurs chez les chats gonadectomisés : ce risque, jusque là peu considéré chez le chat, nécessite des études complémentaires.

 

 

Stérilisation chirurgicale : la gonadectomie n’est pas la seule option

Si une stérilisation définitive par voie chirurgicale est nécessaire ou souhaitée, certaines méthodes chirurgicales sont recommandées par rapport à d’autres :

  • Chez la chienne et la chatte : en l’absence d’affection utérine, l’ovariectomie doit être privilégiée plutôt que l’ovario-hystérectomie, car elle est plus rapide à réaliser, moins invasive et associée à moins de complications.
  • Stérilisation par laparoscopie ou coelioscopie : lorsqu’elle est disponible, cette technique mini-invasive est intéressante car elle est peu douloureuse, associée à moins de complications au niveau des plaies et permet une meilleure visualisation notamment chez les patients de grande taille.

D’autres méthodes, comme la vasectomie et l’hystérectomie (ou encore l’épididymectomie chez le chat), présentent l’avantage de contrôler la reproduction tout en préservant les gonades et les hormones sexuelles. Ces options permettent le maintien des structures sociales dans les populations animales et évitent les dérèglements hormonaux potentiellement impliqués dans les effets à long terme de la gonadectomie. Elles pourraient donc être envisagées dans certaines situations spécifiques, mais des données scientifiques supplémentaires restent nécessaires afin de clarifier les bénéfices et risques associés.

À noter : l’hystérectomie consiste en l’ablation totale de l’utérus (col de l’utérus inclus), tout en laissant les ovaires intacts. Cette technique nécessite un certain apprentissage et un suivi régulier de l’animal.

 

Stérilisation médicale : des alternatives à la chirurgie

Ces méthodes de stérilisation ne nécessitent généralement pas d’anesthésie et présentent l’intérêt de préserver les gonades. Elles peuvent donc s’avérer pertinentes (par exemple lors de risque anesthésique élevé) et correspondre aux attentes de certains propriétaires (choix d’une méthode moins invasive par exemple). Elles sont par ailleurs réversibles, faciles et rapides à réaliser. Il s’agit donc d’alternatives intéressantes à considérer et à évoquer avec les propriétaires de l’animal.

Régulation hormonale :

  • Agoniste de la GnRH (desloréline) : commercialisée sous la forme d’un implant sous-cutané, cette molécule permet de mettre temporairement au repos l’axe hypothalamohypophysaire et d’induire ainsi une infertilité réversible chez le chat mâle et le chien mâle pubère, de retarder l’apparition du 1er oestrus chez la chienne prépubère et, en dehors de son AMM, de reporter l’oestrus chez la chatte et la chienne pubères et en bonne santé.
    Son usage est recommandé notamment en test pré-castration chez le chien mâle, afin d’évaluer l’effet de la suppression de la testostérone sur les comportements indésirables.
  • Hormones stéroïdiennes : progestagènes (acétate de médroxyprogestérone et
    acétate de mégestrol) ou androgènes (mibolérone) :
     utilisées notamment pour retarder l’oestrus chez la chienne et la chatte, leur usage implique un suivi régulier de l’animal et une bonne connaissance des protocoles. L’effi cacité et les effets indésirables associés dépendent du stéroïde administré, de la posologie, du stade du cycle oestral et de l’état de santé de l’animal.

Selon les pays, d’autres techniques peuvent être disponibles ou sont à l’étude comme :

  • Immunocontraception par vaccination : les vaccins à GnRH semblent efficaces chez les chiens et chats mâles et femelles, en supprimant la synthèse de LH et de FSH, mais ils présentent une efficacité variable, de courte durée et nécessitent de multiples injections.
  • Castration chimique par injection intratesticulaire ou intraépididymaire : elle induit une azoospermie chez le chien et le chat mâle par destruction des spermatozoïdes.
    Des réactions indésirables locales et systémiques peuvent survenir si la technique n’est pas correctement exécutée.
  • Thérapie génique : encore à l’étude, elle induirait la surexpression de l’hormone antimüllerienne.

 

En pratique : recommandations finales

La décision de stériliser et la méthode de contraception doivent être mûrement réfléchies et reposer sur une évaluation approfondie de l’animal, du contexte de vie et des motivations et préférences du propriétaire. Le vétérinaire joue un rôle essentiel dans ce processus décisionnel, en évaluant les risques et les avantages de chaque option pour un individu donné et en les exposant de manière claire et exhaustive au responsable de l’animal. Cette approche individualisée et raisonnée permet d’offrir la solution la plus adaptée à chaque animal, à son propriétaire et, à plus grande échelle, de répondre aux besoins et à l’évolution de la société.

 

Synthèse

Les principaux bénéfices pour la santé des différentes méthodes de stérilisation disponibles chez le chien et le chat (animal de compagnie non gravide et ayant accès à un suivi de santé régulier)

 

Castration chirurgicale uniquement

Castration chirurgicale et/ou méthodes alternatives 

(régulation hormonale)

Méthodes alternatives uniquement

(régulation hormonale)

Chien mâle
  • Induction d’une infertilité définitive
  • Prévention et traitement des affections testiculaires, notamment lors de cryptorchidie et de tumeurs hormono-sécrétantes
  • Prise en charge des malformations de l’appareil génital
  • Prévention et traitement des maladies de la prostate (hyperplasie bénigne, prostatite)
  • Traitement des tumeurs bénignes des glandes périanales (adénome, épithéliome)
  • Prise en charge du prolapsus urétral et de la hernie périnéale
  • Prise en charge des comportements indésirables liés à la testostérone
  • Induction d’une infertilité réversible chez l’adulte ou report de la puberté
  • Test pré-castration recommandé pour la prise en charge des comportements indésirables
  • Alternative à la gonadectomie (contre-indication à l’anesthésie, choix du propriétaire, races à risque etc.)
  • Diminution du taux de LH chez les animaux gonadectomisés
Chienne
  • Induction d’une infertilité définitive
  • Prévention et traitement des maladies ovariennes (tumeurs et kystes) et utérines (tumeurs, pyomètre, gestation pathologique)
  • Réduction du risque de tumeurs vaginales et de tumeurs mammaires (recommandé chez les races à risque ou dans certaines circonstances)
  • Traitement d’une polydysendocrinie de dioestrus (insulinorésistance)
  • Prise en charge des symptômes et troubles du comportement liés à la pseudogestation ou lors d’agressivité maternelle
  • Prise en charge du prolapsus vaginal et prévention des récidives
  • Prise en charge d’une tumeur vaginale hormono-dépendante
  • Report de la puberté chez la chienne prépubère
  • Induction d’une infertilité réversible chez la jeune chienne adulte
  • Alternative à la chirurgie (souhait du propriétaire, contre-indication à l’anesthésie)
  • Test avant gonadectomie recommandé pour la prise en charge des troubles du comportement
Chat mâle
  • Induction d’une infertilité définitive
  • Prévention et traitement des affections testiculaires (orchite, tumeurs, cryptorchidie)
  • Diminution de l’agressivité et du marquage urinaire
  • Induction d’une infertilité réversible chez l’adulte ou report de la puberté
  • Alternative à la gonadectomie (contre indication à l’anesthésie, choix du propriétaire, races à risque etc.)
Chatte
  • Induction d’une infertilité définitive et suppression des manifestations de l’oestrus
  • Traitement de la fibroadénomatose
  • Prévention et traitement des affections ovariennes (kystes, tumeur) et utérines (pyomètre, hyperplasie glandulo-kystique, tumeurs etc.)
  • Réduction du risque de tumeurs mammaires (si gonadectomie péripubertaire)
  • Prévention des complications de la gestation et de la pseudogestation (fibroadénomatose, hyperplasie mammaire, mammite)
  • Diminution de l’agressivité et du marquage urinaire
  • Induction d’une infertilité réversible
  • Report de la puberté chez la chatte prépubère
  • Alternative à la gonadectomie (contre-indication à l’anesthésie, choix du propriétaire, races à risque etc.)

 

Fin de la synthèse pratique rédigée d'après le résumé officiel des recommandations et approuvée par le Comité de contrôle de la reproduction (RCC).


 

Communication avec le propriétaire autour de la stérilisation : comment l’aborder ?

La communication avec le propriétaire autour de la stérilisation étant indispensable pour lui permettre de faire un choix éclairé concernant son animal, il est du rôle du vétérinaire de mettre à disposition de ses clients la documentation nécessaire et de stimuler les échanges à ce sujet. Ils peuvent notamment avoir lieu lors d’une consultation dédiée au moment de la puberté de l’animal, et/ou inclus dans les consultations pédiatriques. Anticiper permet au propriétaire de faire un choix mûr et réfléchi.

 

Exemple de calendrier des consultations à proposer :

calendrier-chien-chat-sterilisation.png

 

 

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Le Pr Alain Fontbonne et le Dr Xavier Lévy, experts en reproduction, vous aideront à décrypter ces recommandations et vous donneront des conseils pratiques.

 

 

 

Voir les recommandations sur le site de la WSAVA

 

Texte original Guidelines (site Wiley - Online Library)

 

Texte résumé Executive Summary (site WSAVA)

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La proportion de chiens mâles castrés serait d’environ 30 % en France¹. Dans plus d’un tiers des cas, la demande émane du propriétaire qui souhaite éliminer certains comportements indésirables chez son chien (fugues, poursuite des chiennes, agressivité envers des congénères…) tandis que les vétérinaires sont à l’origine de cette recommandation pour 20 % des chiens mâles². Éviter que le chien ne se reproduise ne préoccupe que 13 % des propriétaires².