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Les besoins des bovins en oligo-éléments

Dr Thibault Devambez
DMV, Responsable Technique Animaux d'Elevage, Virbac France

Les oligo-éléments sont essentiels au maintien de la bonne santé des bovins. Ils sont nécessaires au fonctionnement de nombreuses enzymes et protéines qui contribuent à leur immunité, à leur croissance, à leur production et à leur reproduction.

Les oligo-éléments : des micronutriments essentiels à la bonne santé des bovins

Les oligo-éléments représentent quelques dizaines de grammes dans l'organisme du bovin. Ils ont malgré tout un rôle majeur dans la santé et les performances zootechniques des bovins. Parmi ces métaux, on peut citer notamment le cuivre (Cu), le zinc (Zn), le sélénium (Sn), l'iode (I), le fer (Fe), le manganèse (Mn), le cobalt (Co) et le molybdène (Mo). Leurs actions comme co-facteurs enzymatiques et antioxydants sont essentielles pour le métabolisme de l'organisme (I, Cu, Zn, Se, Co, Mn) et la santé cellulaire, notamment pour les cellules immunitaires. 

 

Entre besoins et apports maximaux

Les besoins en oligo-éléments ont été définis depuis les années 80. La réglementation sur les apports par voie orale a évolué ces dernières années, en limitant les apports maximaux autorisés dans les aliments complémentaires. Cette limitation a pour but d'éviter l'écotoxicité et les teneurs résiduelles dans les produits d'origine animale, notamment le lait et la viande. 

 

Oligo-éléments Apports recommandés INRA 2018 (mg/kg MS) Apports max législation UE (mg/kg MS)
Cu

10

30

Co

0.3

1

Zn

50

120

Se

0.1 - 0.2

0.5

Mn

50

150

Io

0.5 - 0.8

2

 

 

Carences secondaires fréquentes

On distingue les carences primaires des carences secondaires. Les carences primaires sont liées au non-respect des apports recommandés. Mais l'absorption des oligo-éléments (du rumen au gros intestin) étant d'une très faible efficacité (de 1 à 50 % maximum), des carences secondaires sont fréquentes malgré des apports corrects. Elles ont pour origine les compétitions à l'absorption entre oligo-éléments (Cu et Zn, Cu et Mo, Cu et Fe, Se et Fe) et avec les macro-éléments (calcium et souffre principalement). La qualité de l'eau (teneur en calcium, en fer et en soufre notamment) est donc un facteur de risque de carences secondaires. La présence de terre dans l'alimentation et l'accélération du transit limitent également l'absorption des oligo-éléments. Enfin, il est à noter une baisse des concentrations en oligo-éléments des fourrages liée à la qualité des sols et à l'utilisation de variétés à croissance rapide. 
Le dosage plasmatique est aujourd'hui la méthode d'évaluation la plus utilisé pour mettre en évidence des carences sur les bovins. 

 

Impact insidieux des subcarences

L'expression des carences en oligo-éléments est protéiforme du fait des multiples fonctions physiologiques impactées. 
Les troubles cliniques, plus fréquents en élevage allaitant, sont plus sévères sur les jeunes bovins : troubles musculaires (Se, Cu) comme la myopathie du veau, décoloration des poils (Cu), poil piqué (Cu, Zn, Co), dermites (Zn) notamment au niveau du pourtour des yeux... L'impact des carences sur l'immunité favorise les mammites (Se), non-délivrances (Se) et boiteries (Cu, Zn) chez l'adute ainsi que des pathologies néonatales chez le veau (Cu, Zn, Se, I).

Les carences sub-cliniques, si elles demeurent invisibles, altèrent significativement les systèmes anti-oxydant et immunitaire des animaux d'où une moindre réactivité des défenses. 
Les performances zootechniques du troupeau sont également impactées par les carences et les associations de sub-carences. Cela touche aussi bien la fonction de reproduction du mâle (Cu, Zn, Mn, I) que de la femelle (Se, Mn, I). L'impact sur la fonction digestive se traduira par des retards de croisssance (Zn, I) et des baisses de production laitière secondaires (Se, I).

image (4).png

Schéma adapté de Wikse (1992) Beef cattle short course. In ‘Texas A&M Vet. Beef Cattle Short Course’, College Station, TX, USA.(Texas A&M University: College Station, TX, USA)
 

Les besoins ne sont pas constants au cours des cycles d’élevage

Les besoins des bovins en oligo-éléments fluctuent au cours des cycles d’élevage. Les différents types de stress auxquels les animaux peuvent être exposés au cours des cycles de production et de reproduction s’accompagnent d’une augmentation transitoire de leurs besoins en différents nutriments, notamment en oligo-éléments. 

En effet, que le stress subi soit de nature physiologique (mise à la reproduction, mise bas, début de lactation, tarissement, naissance), pathologique (infections, traumatisme, stress thermique) ou zootechnique (allotement, transport, manipulations, transitions alimentaires, sevrage), le métabolisme des bovins augmente et engendre un stress-oxydatif ayant pour conséquence une augmentation des besoins en oligo-éléments.

De nombreuses études ont mis en évidence une baisse du statut nutritionnel en oligo-éléments des bovins associé à un épisode de stress physiologique, pathologique ou zootechnique.

La période de transition (de 3 semaines avant vêlage à 3 semaines après vêlage) fait partie des périodes physiologiquement éprouvantes pour la vache (déficit énergétique, stress, transitions alimentaires et sociales, etc.) qui se traduisent par une diminution des concentrations en oligo-éléments autour du vêlage1. Swenson a montré le déclin naturel du statut en oligo-éléments des vaches au cours du dernier trimestre de gestation, en lien avec une demande croissante en oligo-éléments pour le développement du fœtus2.

Ainsi, les vaches ayant un stockage hépatique adéquat de cuivre avant la mise-bas (110 ppm) deviennent marginalement déficientes au moment de la mise-bas (80 ppm). Même quand les vaches reçoivent une bonne alimentation (avec supplémentation orale), un stress oxydatif apparaît, en raison d’une diminution de la prise alimentaire autour de la mise-bas et de différents stress liés à cette période. 

En période peri-partum, le besoin énergétique nécessaire à la croissance du fœtus d’une part puis surtout au démarrage de la production de lait augmente considérablement, excédant la quantité d’énergie qu’une vache peut obtenir de l’alimentation (balance énergétique négative).

L’oxydation des acides gras dans le foie conduit à une production plus importante de radicaux libres et au développement de stress oxydatif3. La production de radicaux libres augmente à mesure que le métabolisme augmente. Il est alors logique que le besoin en glutathion peroxydase pour métaboliser les radicaux libres augmente également4.

Il a été suggéré que la production d’agents oxydants avait lieu dans de nombreuses maladies des bovins telles que la fièvre de lait, les mammites et la rétention placentaire ; le système antioxydant est altéré par l'accélération du processus de peroxydation des lipides5.

Piccinini et al a montré que la période de transition génère chez les primipares6 une augmentation significative du stress oxydatif. Lors de leur première lactation, les primipares récupèrent de leur première mise-bas, produisent du lait, essaient de concevoir à nouveau tout en poursuivant leur croissance. Cette étude a également montré une diminution significative de la superoxyde dismutase au cours des 14 jours suivant la mise-bas. Ceci aggrave le stress oxydatif, dans la mesure où cet antioxydant très important est moins présent.

Dans une étude de l’Université de Cornell, des vaches laitières ont reçu une supplémentation en oligo-éléments par voie injectable 60 jours avant la mise-bas, 30 jours avant la mise-bas et à 35 jours de lactation ; des améliorations majeures en termes de santé ont été montrées sur tout le troupeau pendant la lactation7. Les bovins supplémentés ont également montré une augmentation de leur taux de superoxyde dismutase, enzyme antioxydante clé, de la période peri-partum jusqu’à 100 jours de lactation8, ce qui a pu atténuer le rôle potentiel du stress oxydatif pendant la période de transition.  

Il est également établi que l’activation de la réponse immunitaire spécifique réclame une forte quantité d’oligo-éléments. Chaque fois qu’un animal est vacciné : Cu, Zn, Se et Mn sont mobilisés pour produire les anticorps. Cette réaction consomme plus particulièrement Zinc et Sélénium9. (Arthington et al, 2012)

> Replay de la webconférence Oligo-éléments et vaccination : un couple gagnant  Voir

 

 

 

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Littérature scientifique

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Références

1. Meglia 2004. Prediction of Vitamin A, Vitamin E, Selenium and Zinc Status of Periparturient Dairy Cows Using Blood Sampling During the Mid Dry Period. Acta Vet Scand 45 : 119–128. 
2. Swenson 1998. Influence of mineral supplementation on blood serum and liver mineral concentrations in first calf beef heifers. Ph.D. Dissertation. NM State Univ., Las Cruces.
3. Miller et al 1993. Oxidative Stress, Antioxidants and Animal Function. J Dairy Sci 76(9) : 2812-2823. 
4. Underwood & Suttle 1999. The Mineral Nutrition of Livestock. 
5. Al-Qudah 2009. Oxidative Stress in Calves with Acute or Chronic Bronchopneumonia. Revue Méd Vét 160(5) : 231-236.
6. Piccinini et al. 2004. The evaluation of non-specific immune status of heifers in field conditions during the periparturient period. Vet Res 35(5) : 539–550.
7. Machado et al. 2013. Effect of an injectable trace mineral supplement containing selenium, copper, zinc, and manganese on the health and production of lactating Holstein cows. Vet J 197(2) : 451–456.
8. Machado et al. 2014. The effect of injectable trace minerals on peripheral blood leukocyte activity and serum superoxide dismutase. Vet J 200(2) : 299-304.
9. Arthington & Havenga 2012 Effect of injectable trace minerals on the humoral immune response to multivalent vaccine administration in beef calves. Journal of Animal Science 90(6) : 1966-1971. doi: 10.2527/jas.2011-4024