De nombreux nutraceutiques, sans parler des diverses présentations les associant, sont couramment utilisés dans la gestion des troubles de la mobilité. La nature et l’origine de ces produits potentiellement actifs sont très différentes :
Les nutraceutiques se différencient également par leur mode d’action : restructurants du cartilage et du liquide synovial, soutien de l’immunité innée, propriétés antioxydantes (voir encadré).
Les molécules les plus fréquentes ayant fait l’objet d’études et de méta-analyses sont le sulfate de chondroïtine, la glucosamine et les acides gras omega-3. Aujourd’hui, même s’ils sont fréquemment utilisés en pratique, les produits à base de chondroïtine et glucosamine manquent de preuve d’efficacité chez le chien et le chat ; certaines études concluent même à un effet placebo parfois marqué lors d’évaluation subjective de la prise des produits2,5.
Aujourd’hui, même s’ils sont fréquemment utilisés en pratique, les produits à base de chondroïtine et glucosamine manquent de preuve d’efficacité chez le chien et le chat.
En revanche, que ce soit sous la forme de compléments ou incorporés dans des aliments enrichis, les AGE w3 sont les produits pour lesquels il y a le plus grand nombre d’essais avec une efficacité avérée. Ils ont permis une amélioration de la mobilité lors de troubles chroniques chez le chien et le chat, aussi bien en tant que complément qu’en tant qu’incorporés dans l’alimentation. De nombreuses études rapportent des avantages biologiques des régimes alimentaires enrichis en EPA et DHA chez le chien, permettant de diminuer la prescription d’anti-inflammatoires. Compte tenu des capacités limitées de conversion de l’ALA en EPA ou DHA, il convient de privilégier les compléments à base de EPA/DHA, naturellement présents dans les produits issus de la mer (poisson, krill, moule) plutôt que les huiles végétales comme le lin riches en ALA4, 8, 17, 18, 19, 20.
Parmi les autres nutraceutiques ayant fait l’objet d’études récentes, des résultats prometteurs ont été observés avec du collagène (principalement le collagène dénaturé de type II et l’ESM), l’extrait de Boswellia serrata, les ASU et les cannabinoïdes4.
Le collagène dénaturé de type II présenterait une action modulatrice sur la réponse immunitaire par l’intermédiaire du collagène de type II présent au niveau du cartilage10,18. Tout comme l’acide hyaluronique, l’ESM (Egg Shell Membrane, membrane de coquille d’œuf) a montré une activité inhibitrice sur la production de cytokines proinflammatoires (notamment IL-2), se traduisant par une diminution d’inconfort et de raideur15. L’apport en ESM permettrait en outre un maintien de la masse musculaire et une amélioration de la mobilité chez des chiens atteints de dysplasie de la hanche. Chez l’Homme, une étude sous-entend une réponse dose-dépendante sur les gênes articulaires1.
La résine de Boswellia serrata présente des propriétés préventives sur la dégradation du collagène et inhibitrices sur certains médiateurs (LOX notamment) grâce aux acides 3-acétyl-11-céto-β-boswellique (AKBBA) et β-boswellique (BBA). Bien que les concentrations de ces acides soient très variables d’une présentation à une autre7, une supplémentation quotidienne de 400 mg/10kg de PV pendant 6 semaines a procuré une diminution significative de l’inconfort et de la raideur articulaire chez près de ¾ des chiens dans une étude.
Caroténoïde issu de microalgue, l’astaxanthine présente un effet antioxydant et diminue la production de monoxyde d’azote et de prostaglandine E2, ainsi que la mort cellulaire nécrotique des chondrocytes lors de processus arthrosique11. Enfin, la vitamine D3 a un rôle de soutien de l’immunité innée lors d’inflammation.
Dans la grande majorité des études, l’efficacité n’est constatée qu’au bout de 2-3 mois de prise continue3, 6, 9, 15, 16. Il est donc intéressant de prendre en considération la facilité de l’administration du chondroprotecteur pour une bonne observance à long terme. Par ailleurs, certaines études ont constaté une différence d’efficacité en fonction du nombre d’articulations concernées et/ou de leur localisation. Les effets bénéfiques sont par exemple plus marqués sur le grasset plutôt qu’au niveau de la hanche et encore plus au niveau de l’épaule10.
Enfin, de nombreuses présentations vétérinaires sont composées de différents chondroprotecteurs.
Non seulement, cela permet d’associer des principes actifs ayant un mode d’action différent, tout en conservant une très bonne innocuité, mais aussi de profiter d’un effet synergique que l’on peut constater dans certaines études.
Ainsi, l’association de membrane de coquille d'œuf, d’acide hyaluronique à haut poids moléculaire, de l’extrait de Boswellia serrata et de l’astaxanthine améliore significativement la mobilité des chiens évaluée après 12 semaines de traitement15.
Autres exemples, la farine de krill, par ses phospholipides, favorise l’absorption de l’acide hyaluronique et de l'astaxanthine liposoluble, tandis que l’absorption de la glucosamine seule est inférieure à celle obtenue quand elle est associée au chitosan12, 13, 14.
Enfin, une étude suppose un effet synergique entre un anti-inflammatoire du groupe des coxibs et un complément en collagène, leur association procurant de meilleurs résultats par rapport à leur utilisation seule10.
Références de l'article :
1.Canovas et al.doi :10.3390/nu14112340
2.Scott et al. Doi :10.3415/VCOT-17-02-0020
3.Musco et al. Doi : 10.1002/vms3.182
4.Ratsch et al. Doi : 10.1016/j.cvsm.2022.03.002
5.Cunningham et al. Doi : 10.1177/1098612X211053484
6.Comblain et al. Doi :10.1186/s12917-017-1317-8
7.Miscioscia et al. Doi : 10.1186/s12917-019-2021-7
8.Johnson et al. Nutrition and nutraceuticals in the changing management of osteoarthritis for dogs and cats. JAVMA, jun 15, 2020, 256(12), 1335-1341
9.Scott el al. doi: 10.3415/VCOT-17-02-0020
10.Stabile et al. doi: 10.1016/j.rvsc.2022.06.030
11.http://dx.doi.org/10.1351/pac199163010141
12.https://doi.org/10.1016/j.foodres.2016.10.010.
13.https://doi.org/10.1016/j.tvjl.2019.105379.
14.https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17352029/.
15.Muller et al. Doi :10.1016/j.tvjl.2019.105379
16.Gabriele et al. Doi : 10.1080/14786419.2022.2119967
17.Manfredi et al. Effect of a commercial available fish-based dog food enriched with nutraceuticals on hip and elbow dysplasia in growing Labrador retrivers. The Canadian Journal of Veterinary Research, 2018;82:154-158
18.Eckert et al. doi: 10.3390/md19100542
19.https://doi.org/10.1016/j.rvsc.2018.10.002.
20.Martinez et al. doi: 10.3390/pharmaceutics9030030
21.Masson L. Vademecum des nutraceutiques chez les animaux de compagnie. Editions Med’Com, 2021, 317p. ISBN : 978-2-35403-291-3