Virbac Pro
Infos santé | Dentaire
Temps de lecture : 4 minutes

Hygiène bucco-dentaire des chats et des chiens : Les conseils pratiques d'un spécialiste [Interview]

Score5 (3 Votes)

Dr Florian Boutoille
DMV, Dipl. Collège européen de dentisterie vétérinaire (EVDC) Exercice exclusif en dentisterie et chirurgie maxillo-faciale (CHV Atlantia, Nantes) Ex-président du Groupe d'étude en odonto-stomatologie (Geros) de l’AFVAC.

Chez le chien et le chat, tout comme pour l’être humain, l’hygiène bucco-dentaire est la clé de la prévention des maladies bucco-dentaires et par conséquent des troubles qui peuvent en découler. Le propriétaire a un rôle majeur dans la réalisation régulière des soins d’hygiène chez son animal. La tâche du vétérinaire est de sensibiliser et conseiller le propriétaire sur le choix des meilleurs soins à mettre en place et lui apprendre à les réaliser. Pour cela, le praticien doit lui-même être convaincu de l’intérêt de ces soins et connaître leur efficacité.

En tant que spécialiste en dentisterie, pour vous quelle est la clé du succès pour limiter la maladie parodontale ?

La prévention primaire est la clé du succès. Les soins d’entretien des dents concernent le chiot ou jeune adulte pour prévenir l’apparition de la maladie (prévention primaire). Et chez l’adulte atteint de maladie parodontale, après traitement parodontal (détartrage, curetage sous-gingival, polissage, éventuelles extractions...), afin d’éviter les récidives et l’aggravation des lésions (prévention secondaire).

Il est toujours souhaitable d’encourager la prévention primaire car, en évitant l’apparition de la maladie, elle est plus efficace mais également moins astreignante. Sur des dents détartrées et polies, la plaque dentaire se reforme en 6 à 8 heures et s’organise progressivement en un biofilm structuré en 24 heures1. L’hygiène bucco-dentaire doit donc être un acte fréquent et régulier. En l’absence de soins et de prévention, la maladie parodontale peut avoir des répercussions, locales ou systémiques, graves.

 

floran-vbi-boutoille-chat-hbd.png

Habituer les animaux au brossage des dents dès leur plus jeune âge, permet l’acceptation et l’observance du soin.

 

Considérez-vous que le brossage des dents est le soin de référence, en termes d’hygiène ?

Tout à fait, le brossage dentaire est la référence en termes d’hygiène bucco-dentaire. L’action mécanique des poils de la brosse est primordiale pour désorganiser le biofilm bactérien qui s’étale à la surface des dents, mais en plus l’extrémité des poils pénètre également de quelques millimètres sous la gencive là où la plaque sous-gingivale s’accumule.

 

Quels sont les conseils à donner aux propriétaires ?

Chez le chien et le chat, il est conseillé de réaliser le brossage avec une brosse à dents à poils souples (afin de ne pas léser le parodonte) préalablement enduits de dentifrice qui apportera en plus de l’action mécanique des poils une action chimique « anti-plaque».

D’une manière générale, il faut essayer d’appliquer la technique de brossage dite « de Bass modifiée» reconnue comme étant la plus efficace2. Les poils de la brosse à dents sont positionnés au niveau de la gencive et du collet des dents avec une orientation de 45° par rapport à la surface dentaire et sans pression excessive. Il convient bien sûr d’adapter la faisabilité de la technique au chien ou au chat. Pour les dents incisives et canines : réaliser des mouvements en rouleau de la gencive vers la dent. Pour les prémolaires et molaires (moins accessibles), glisser la brosse sous les babines et réaliser de petits mouvements circulaires.

 

Training pour le brossage des dents

cha-hbd-boutoille-vbi.png  chat-vbi-hbd-boutoille.png

1) Habituer le chien ou le chat à ce qu'on lui manipule la gueule dès son plus jeune âge

  •  Lui caresser la tête en le rassurant, maintenir sa tête d’une main et de l’autre soulever doucement ses babines.
  • Passer le doigt sur ses dents et ses gencives.
  • S’il n’est pas à l’aise, ne pas le forcer, il faut y aller progressivement et répéter l’exercice plusieurs fois

 

2) Habituer le chien ou le chat au dentifrice

  • Procéder de la même manière en mettant du dentifrice sur le doigt.
  • Masser doucement les gencives avec le dentifrice sur le doigt ou le doigtier.
  • L’animal peut avaler le dentifrice, les formulations vétérinaires peuvent être avalées.

 

3) Commencer à utiliser la brosse à dents

  • Quand l’animal est habitué, la brosse à dents peut être utilisée. Elle doit être de format adapté à la taille du chien ou du chat, et avoir des poils souples.
  • Faire pénétrer le dentifrice entre les poils de la brosse
  • Tenir doucement la gueule de l’animal pour l’empêcher de mordiller la brosse.
  • Brosser les dents de devant « verticalement » en partant de la gencive vers le bout des dents.
  • Pour les dents les plus en arrière, glisser la brosse sous les babines et brosser les dents en effectuant des petits mouvements circulaires.

 

 

Des études confirment-elles ce choix du brossage ?

Tout à fait, des publications chez le chien ont montré que le brossage seul au moins trois fois par semaine permet de maintenir des gencives saines chez un chien jeune, alors qu’un brossage seulement une fois par semaine ne le permet pas.

Lorsqu’une gingivite est déjà présente, il faut passer au brossage quotidien pour rétablir des gencives saines3. Un brossage une ou deux fois par semaine ne peut être suffisant et efficace.

Une étude de 2015 s’intéresse à évaluer l’efficacité du brossage dentaire en fonction de sa fréquence. De manière logique il en ressort que le groupe, brossé tous les jours, présente une accumulation de plaque dentaire moindre que le groupe brossé un jour sur deux. En outre, il est intéressant de noter qu’il n’y a pas de différence significative notable sur la réduction d’accumulation de plaque dentaire entre les groupes ne recevant pas de brossage dentaire et ceux étant brossés une semaine sur deux et toutes les semaines.

Ces résultats laissent entendre que si le brossage est effectué avec une fréquence  trop faible il perd son intérêt4.

 

A lire sur ce thème

Hygiène bucco-dentaire : Les rituels de soins à conseiller au quotidien

Le propriétaire est l’acteur central dans la réalisation régulière des soins d’hygiène bucco-dentaire de son animal. Le conseiller permet la mise en place, au quotidien de rituels de soins préventifs efficaces.

Maladie parodontale des chats et des chiens :
Gestes techniques & conseils pratiques d'un spécialiste en dentisterie

[Replay] Le Dr Florian Boutoille, spécialiste en dentisterie vétérinaire, vous proposera des conseils pratiques applicables immédiatement dans votre pratique quotidienne.

Maladie parodontale : Les conséquences chez le chien

La maladie parodontale se développe au détriment des tissus de soutien de la dent. Elle débute par une gingivite. Ensuite elle peut évoluer jusqu’à une destruction du parodonte (gencive, ligament parodontal, os alvéolaire et cément), on parle alors de parodontite. En l’absence de soins et de prévention, elle peut avoir des répercussions, locales ou systémiques, loin d’être anodines.

Développement et place de la dentisterie dans la médecine vétérinaire

La dentisterie est une discipline peu développée en France, certainement car peu enseignée dans les écoles vétérinaires, et trop souvent limitée au seul détartrage. Même si ce dernier occupe une place importante dans la prise en charge de nombreuses pathologies buccales, la dentisterie est souvent négligée dans notre pratique quotidienne. Pourtant l’impact des dents sur la santé des animaux n’est plus à démontrer.

Références 

1. Hennet P, Boutoille F. Guide pratique de stomatologie et de dentisterie vétérinaire. Paris : Med'com 2013, 319p.
2. Bass C. An effective method of personal oral hygiene. Part II. J State Med Society 1954 ; 160 : 100-12.
3. Tromp JA, JansenJ, Pilot T. Gingival health and frequency of tooth brushing in the beagle dog model. Clinical findings. J Clin Periodontol 1986b, 13(2) : 164-8.
4. Harvey C, Serfilippi L, Barnvos D. Effect of Frequency of Brushing Teeth on Plaque and Calculus Accumulation, and Gingivitis in Dogs. J Vet Dent. 2015 Spring;32(1):16-21.