Les malocclusions peuvent concerner les incisives et/ou les prémolaires et molaires. Pour ces dernières, un limage associée à l'extraction de certaines dents permet de traiter ces problèmes mais de façon le plus souvent transitoire. En ce qui concerne les incisives, une technique chirurgicale d'extraction complète permet de résoudre définitivement les problèmes de malocclusion de ces dents.
Le lapin possède 6 incisives : 4 incisives supérieures et 2 incisives inférieures. Les quatre incisives supérieures sont divisées en 2 incisives crâniales et 2 incisives caudales (incisives secondaires) de plus petite taille, cachées derrière les premières. Les extrémités des incisives supérieures crâniales et des incisives inférieures s'affrontent normalement et cet affrontement permet un limage naturel et limite ainsi la croissance continue de ces dents.
Malocclusion des incisives chez un lapin
En cas de malocclusion, les incisives ne s'affrontent plus correctement et leur croissance n'est alors plus limitée. La pousse excessive d'une ou de plusieurs incisives empêche rapidement le lapin de s'alimenter correctement.
Incision et rupture du ligament alvéolo-dentaire à l'aide d'un syndesmotome de Crossley
Ces anomalies s'observent sur des individus prognathes ou brachygnathes, lors de déviations latérales de la mandibule, d'abcès alvéolo-dentaire, de malformation congénitale ou encore après fracture dentaire, de l'os mandibulaire ou de l'os maxillaire.
Le premier traitement consiste à limer l'extrémité des incisives sous anesthésie, à l'aide d'une fraise montée sur turbine. La coupe des dents à la pince est fortement déconseillée, en raison des risques de fracture dentaire ou osseuse et des risques d'exposition de la pulpe dentaire. Les récidives sont souvent fréquentes car les déformations primaires (de l'alvéole, de la mandibule etc…) ne sont pas traitées.
En cas de récidives trop fréquentes et trop rapprochées dans le temps, il est maintenant conseillé d'effectuer une exérèse complète des 6 incisives.
Le lapin est anesthésié et placé en décubitus latéral, ventral ou dorsal, selon la position des dents et la préférence du chirurgien, de façon à opérer avec un maximum de stabilité et de précision des mouvements pour éviter les risques de fractures de la mâchoire. La gencive est désinfectée à l'aide de povidone iodée ou de chlorhexidine. A l'aide du syndesmotome, le ligament alvéolo-dentaire de chacune des incisives est rompu par des mouvement cranio-caudaux et de rotation de l'instrument.
Incision et rupture du ligament alvéolo-dentaire à l'aide d'un syndesmotome de Crossley
Le syndesmotome est placé successivement médialement et latéralement à la dent, entre celle-ci et la gencive. Les parties rostrale et caudale du ligament alvéolo-dentaire sont plus facilement rompues à l'aide d'une aiguille 18G dont l'extrémité a été préalablement aplanie. Les mouvements des instruments doivent être soigneux et doivent respecter l'arrondi de la dent sur toute sa longueur afin d'éviter les fractures dentaires et osseuses. Une simple aiguille permet de rompre le ligament des incisives supérieures secondaires.
Au cours de ces mouvements, la dent devient peu à peu mobile jusqu'à se désolidariser complètement de son alvéole. Afin d'éviter les repousses ultérieures, il convient de retirer ou au moins d'écraser le bourgeon germinal de l'incisive. Pour cela, la dent devenue mobile est saisie à l'aide d'une pince et tournée sur elle-même en appuyant sur sa base. Après quelques mouvements de rotation, elle est extraite en tirant dessus en respectant toujours sa forme arrondie afin d'éviter les fractures. Les incisives supérieures sont souvent plus difficiles à extraire en raison de leur forme plus arrondie. Les mouvements de rotation au moment de l'extraction sont particulièrement importants et souvent orientés latéralement.
Orifices laissés ouverts après extraction
Orifices suturés après extraction
Aucune résistance ne doit être ressentie à l'extraction de la dent. Dans le cas contraire, cela signe la persistance de fibres ligamentaires à rompre. La présence du bourgeon germinal s'observe facilement par son aspect globuleux, mou et brillant à l'apex de la dent.Il est toujours possible de détruire à l'aide d'une aiguille introduite dans l'orifice alvéolaire.
L'orifice est ensuite rincé à la povidone iodée ou à la chlorhexidine avant d'être suturé à l'aide d'un point simple au monofil résorbable. Il est également possible de laisser les orifices ouverts, sans suture, surtout en cas d'abcès dentaire pour en permettre le drainage.
Une radiographie post-opératoire permet de vérifier l'absence de couronne dentaire dans l'alvéole.
Des antalgiques et un antibiotique sont administrés pendant et après l'intervention. Une alimentation semi-liquide est parfois nécessaire pendant 2 ou 3 jours (bouillies ou soupes de légumes), avant la reprise normale de l'alimentation (foin, légumes râpés, fruits râpés, granulés).