La pandémie qui touche actuellement le monde est une illustration parlante du phénomène de défiance vaccinale.
Le SARS-CoV-2, identifié pour la première fois fin 2019 en Chine s’est propagé quasi immédiatement dans le monde entier. En décembre 2020, la France enregistre 2.3 millions de personnes infectées, 228 600 personnes hospitalisées et environ 83596 décès. La situation sanitaire et socio-économique est catastrophique.
C’est une démonstration grandeur nature des dangers d’un agent pathogène circulant dans une population complètement naïve d’un point de vue immunologique.
Au même moment, les résultats de l’essai de phase III du vaccin ARN co-développé par Pfizer et BioNTech sont disponibles. En résumé, 40000 volontaires ont été répartis en 2 groupes, placébo vs vaccinés, et le taux d’infection 7 jours après la 2ème dose a été évalué dans chaque groupe. Les résultats indiquent une protection vaccinale à 95%.
En parallèle, l’innocuité a également été évaluée. Des effets secondaires liés à la réactogénicité du vaccin ont été notés : 70% des patients vaccinés ont présenté une douleur au point d’injection après la 1ère dose et 40% des patients un syndrome grippal après la 2ème dose.
En revanche, l’incidence des effets secondaires graves était la même dans les 2 groupes et était très faible. Les scientifiques avaient donc réussi l’exploit de mettre au point un vaccin sûr et efficace moins de 1 an après la découverte du virus.
Pourtant, les sondages réalisés à l’époque montrent que les Français semblaient très réticents vis-à-vis de ce vaccin, puisqu’en décembre 2020, à peine 40% étaient prêts à se faire vacciner. Compte tenu du pouvoir infectieux du virus à l’époque (le fameux R0), la couverture vaccinale nécessaire pour bloquer la circulation du virus était d’environ 70%. On était donc loin du compte. Les différents sondages réalisés montrent que la raison principale de ce refus vaccinal était le manque de confiance et la peur des effets secondaires vis-à-vis d’un vaccin développé « trop vite » et pour lequel il n’y avait pas de recul.
La deuxième raison invoquée est que les personnes interrogées ne se sentaient pas concernées par les formes graves de la maladie. La situation actuelle montre que cette défiance vaccinale persiste malgré l’utilisation à grande échelle de ce vaccin prouvant son efficacité et son excellent profil d’innocuité.
La vaccination contre la Covid 19 est une illustration du problème de la défiance vaccinale.
De plus en plus de praticiens vétérinaires sont confrontés à des interrogations et des inquiétudes des propriétaires vis-à-vis de la vaccination de leur animal. Quelle est l’étendue du phénomène de défiance vaccinale dans le monde vétérinaire ?
Les dernières données publiées par l’observatoire national de la vaccination montrent qu’en 2020, près de 78% des chiens étaient protégés contre la parvovirose, l’hépatite de Rubarth, la maladie de Carré et la leptospirose. La couverture vaccinale avec les valences essentielles chez le chien est donc proche de celle qui était observée chez l’Homme pour la rougeole avant la mise en place de la vaccination obligatoire (données santé publique France).
Les chiffres sont beaucoup plus bas chez le chat, avec seulement 23% des chats protégés contre le typhus et le coryza en 2020.
Les raisons de la sous-vaccination des animaux de compagnie sont nombreuses.
La première est la sous-estimation de la gravité des maladies ciblées par la vaccination mise en opposition au coût de la vaccination des animaux. Les vaccins sont en effet victimes de leur efficacité. En vaccinant les animaux, les grandes maladies infectieuses sont devenues rares et les propriétaires ne perçoivent plus les risques. Pourtant, différents exemples montrent que les pathogènes circulent toujours et que des foyers infectieux apparaissent régulièrement sur des animaux pas ou mal vaccinés (Virus de la maladie de Carré et faune sauvage). Le coût financier pour le propriétaire est alors largement supérieur au coût de la vaccination. À cela s’ajoutent la souffrance de l’animal malade et le risque de décès.
En médecine vétérinaire, comme en médecine humaine, le phénomène de la défiance vaccinale s’amplifie.
Les "antivax" vétérinaires utilisent les mêmes arguments et les mêmes méthodes de communication que leurs homologues humains. Les réseaux sociaux constituent un système de diffusion redoutable. La base de la communication "antivax" est principalement basée sur la dangerosité des vaccins et la peur des effets secondaires.
Pour illustrer cette dangerosité, ils utilisent des exemples individuels à titre de preuve. Par exemple, le diagnostic d’un lymphome sur un animal vacciné quelques jours ou semaines avant démontre que le vaccin est responsable du lymphome. La preuve individuelle est l’exemple de la confusion (parfois délibérée) entre le lien temporel et le lien causal. Or, seules des études à grande échelle sur des cohortes importantes permettent de définir l’existence d’un lien causal entre un vaccin et un effet secondaire. Les affirmations de dangerosité sont soutenues par des individus auto proclamés spécialistes, dont la crédibilité scientifique est souvent inexistante ou douteuse.
Pour limiter l’utilisation des vaccins, jugés dangereux, les antivax proposent des substances naturelles, considérées comme moins toxiques et plus efficaces, alors que l’efficacité (voire l’innocuité) de ces substances alternatives n’a jamais été démontrée.
L’ensemble de ces arguments est lié à un contexte plus global de théorie du complot, selon laquelle les autorités sanitaires (et donc les gouvernements) seraient à la solde des grandes industries pharmaceutiques. Pourtant, les données actuelles disponibles montrent que les vaccins vétérinaires sont efficaces et présentent un excellent profil d’innocuité. Ces données sont présentées dans l’article « le point sur les adjuvants et la vaccination ».
Il faut donc continuer à expliquer aux propriétaires que la balance bénéfice/risque est largement en faveur du bénéfice vaccinal et combattre les idées fausses circulant à propos des vaccins.