La leptospirose est une zoonose de répartition mondiale causée par un spirochète du genre Leptospira. Approximativement 200 sérovars, répartis en 24 sérogroupes, sont reconnus dans le monde. Sur l’année 2020, le laboratoire des leptospires de VetAgro Sup a analysé 1166 sérums de chien, confirmant l’infection leptospirosique chez 227 (19,5%) d’entre eux par la technique MAT (Microscopic Agglutination Test) (Rapport de l’activité « diagnostic » 2020 – Pr. Angeli Kodjo). Les deux sérogroupes largement dominants étaient Australis et Sejroe, suivis de Grippotyphosa, Icterohaemorrhagiae, Autumnalis et Canicola. A noter que les sérologies positives à Australis l’étaient chez des chiens non vaccinés pour cette valence, et que le sérovar Sejroe augmente depuis quelques années. En 2014, la même équipe avait publié une étude épidémiologique sur la répartition géographique de la leptospirose en France. Les sérogroupes prédominants à cette époque étaient Australis et Grippotyphosa (Ayral 2014). Le recul du sérogroupe Grippotyphosa peut s’expliquer par l’introduction de cette valence dans la vaccination à partir de 2015.
La contamination va se faire dans un environnement aquatique ou au contact de mammifères sauvages servant de réservoirs. Ainsi, les chiens de chasse, vivant en chenil ou allant régulièrement se baigner sont parfois surreprésentés dans les études. Cependant, il n’existe pas de prédisposition d’âge, de sexe ou de race, et n’importe quel chien, de n’importe quel âge, peut être affecté par cette maladie.
La leptospirose est une maladie saisonnière. Les pics de contamination vont varier en fonction des régions, mais suivent souvent des périodes de fortes pluies et de chaleur. Ainsi, printemps et automne sont des périodes à risque.
Chez le chien, la leptospirose présente un important polymorphisme de symptômes qui rend parfois le diagnostic difficile. Le temps d’incubation entre la contamination et le début des symptômes (abattement, anorexie, hyperthermie, troubles digestifs) est généralement de 7 jours. Les signes cliniques les plus fréquents sont :
Le diagnostic de leptospirose va se faire par l’association des signes cliniques avec différents tests (sérologiques rapides, PCR sang et/ou urine, sérologie MAT).
La MAT est la technique diagnostique de référence, et permet de connaître le(s) sérogroupe(s) infectant(s). Elle doit être interprétée en connaissant le type de vaccin et sa date de réalisation. En cas de doute, une 2ème sérologie 1 à 2 semaine(s) plus tard permet d’objectiver une séroconversion lors d’affection leptospirosique.
Le traitement repose sur l’utilisation d'antibiotiques. Le consensus européen recommande l’utilisation de doxycycline à 5 mg/ kg 2 fois par jour ou 10 mg/kg une fois par jour pendant 14 jours. Chez les chiens présentant des troubles digestifs ne permettant pas l’administration entérale de doxycycline, une pénicilline peut être utilisée. Cependant, il sera important de respecter les 14 jours de doxycycline quelle que soit la durée du traitement aux pénicillines afin d’assurer une bonne pénétration dans le parenchyme rénal et d’éviter un portage sain. Le reste des traitements sont des traitements symptomatiques en fonction de la présentation clinique.
Le consensus Européen sur la leptospirose recommande l'utilisation de vaccins quadrivalents.
Les vaccins disponibles contiennent 2 (Canicola et Icterohaemorrhagiae), 3 (+ Grippotyphosa) ou 4 (+ Australis) sérogroupes. En France, le sérogroupe Australis est très présent, il est donc primordial de vacciner avec les vaccins quadrivalents sur l’ensemble du territoire. Le consensus européen sur la leptospirose recommande la réalisation de 2 injections à 1 mois d’intervalle, puis 1 injection par an du vaccin quadrivalent.
Lorsque l’animal est vacciné avec un vaccin bi ou trivalent, une primovaccination avec le vaccin quadrivalent doit être réalisée afin d’assurer une protection contre le sérogroupe Australis. Une étude de l’université de Bern (Francey 2020) a montré une diminution du nombre de cas de leptospirose admis pour IRA de 56,7 à 15,7 cas/an après l’introduction du vaccin L4 sur le territoire.
Ictère flamboyant chez un chien atteint de leptospirose
L’augmentation des réactions vaccinales est souvent avancée comme une raison de ne pas vacciner avec le vaccin quadrivalent. Cependant, les vaccins bi ou tri-valent n’apportent pas suffisamment d’immunité croisée pour assurer une bonne immunité contre le sérogroupe Australis, et le rapport bénéfice/ risque est aujourd’hui largement en faveur de la vaccination L4. De plus, il peut être intéressant de décaler les périodes de vaccination avant les périodes à risque (baignades, chasse...) de manière à avoir le plus d’anticorps vaccinaux pendant la période à risque. La durée de l’immunité après une infection leptospirosique n’est pas totalement connue. Ainsi, le consensus européen recommande de vacciner l’animal dès que possible après la guérison complète. D’autres mesures de prévention comme l'assèchement des points d’eau stagnants, l’éradication des rongeurs sont également importantes. Le consensus européen ne recommande pas l’utilisation préventive de doxycycline pour les animaux sains vivant dans des zones à risque.
Indications de l'hémodialyse
Les techniques d’épuration extra-rénale sont parfois nécessaires dans les cas suivants :
Azotémie sévère ne répondant pas à une fluidothérapie adaptée. Ainsi, il est primordial, dans les premières heures d’hospitalisation d’un chien en insuffisance rénale aiguë, de corriger la volémie puis la déshydratation. Une fois ces 2 paramètres corrigés, la fluidothérapie doit être au moins égale à la diurèse.
Pour mesurer précisément la diurèse, une sonde urinaire doit être mise en place.
Troubles électrolytiques importants : le plus fréquent lors d’IRA est l’hyperkaliémie
Oligo-anurie : diurèse < 0,5 ml/kg/h
Surcharge volumique : celleci peut se voir par la prise de poids sur un animal anorexique et sous perfusion, l’apparition d’œdème périphérique et/ou d’épanchement cavitaire.
Chienne en insuffisance rénale aiguë secondaire à
une leptospirose, pendant la séance d'hémodialyse
Bibliographie :
1. Ayral FC, Bicout DJ, Pereira H, Artois M, Kodjo A. Distribution of Leptospira serogroups in cattle herds and dogs in France. Am J Trop Med Hyg. 2014 Oct;91(4):756-759. doi: 10.4269/ ajtmh.13-0416.
2. Sonet J, Barthélemy A, Goy-Thollot I, Pouzot-Nevoret C. Prospective evaluation of abdominal ultrasonographic findings in 35 dogs with leptospirosis. Vet Radiol Ultrasound. 2018 Jan;59(1):98-106. doi: 10.1111/vru.12571.
3. Barthélemy A, Magnin M, Pouzot- Nevoret C, Bonnet-Garin JM, Hugonnard M, Goy-Thollot I. Hemorrahagic, hemostatic, and thromboelastometric disorders in 35 dogs with a clinical diagnosis of leptospirosis : A prospective study. J Vet Intern Med. 2017 Jan ;31(1) :69-80.
4. Schuller S, Francey T, Hartmann K, Hugonnard M, Kohn B, Nally JE, Sykes J. European consensus statement on leptospirosis in dogs and cats. J Small Anim Pract. 2015 Mar;56(3):159- 79. doi: 10.1111/jsap.12328.
5. Francey T, Schweighauser A, Reber A, Schuller S. Evaluation of changes in the epidemiology of leptospirosis in dogs after introduction of a quadrivalent antileptospiral vaccine in a highly endemic area. J Vet Intern Med. 2020 Nov;34(6):2405-2417. doi: 10.1111/ jvim.15947.